Vivant Denon

Mon Louvre par Antoine Compagnon

Vivant Denon

Comment un jour ou l’autre ne pas évoquer la mémoire de Vivant Denon ? Sans lui le Louvre ne serait pas ce qu’il est, mais aussi ce qu’il n’est plus, car son héritage reste ambigu. Avant le premier Consul le nomme en 1802 directeur général du muséum central des arts, plus tard musée Napoléon, encore plus tard musée du Louvre, Vivant Denon était un graveur vaguement licencieux de l’Ancien Régime, émigré sous la Révolution, mais qui accompagna l’expédition d’Égypte en 1798 et servit par la suite les ambitions de son maître. Initialement opposé au déplacement des œuvres d’art, il se battit pour enrichir les collections parisiennes des pièces saisies dans les pays conquis, au premier chef en Italie. Il fit du Louvre un musée universel, une histoire de l’art en grandeur nature. Pédagogue, il réorganisa la Grande Galerie comme un « cours historique de l’art de la peinture » à destination de tous les publics. Enfin, en 1815, avant de démissionner, il assista au démantèlement de son musée et à la restitution de la plupart des œuvres conquises. Son excellent portrait par Prud’hon, Le Baron Vivant Denon (Sully, salle 936), montre un homme affable, élégant, rusé. À l’heure où il est tant question du retour chez elles des œuvres dépouillées, il semble opportun de rappeler que Napoléon et Vivant Denon, responsables, après la Révolution, d’un grand remue-ménage des collections européennes, cultivèrent l’œil moderne.