Le maître de forges

Mon Louvre par Antoine Compagnon

Le maître de forges

Qui aurait imaginé que le Louvre avait son forgeron ? Vous peut-être. Moi certainement pas. Ce fut l’une des révélations bouleversantes de mon séjour dans les sous-sols du palais, à la rencontre des métiers d’art dans leurs ateliers : le bois, la pierre, les métaux, la lumière, l’encadrement, le transport des œuvres… L’activité déployée dans les caves du palais en fait le décor d’un opéra de Wagner. Entendre le bruit du marteau frappant l’enclume à la lueur de la forge, quelques étages sous la chambre de la princesse Leszczynska, cela m’a rappelé le Paris de mon enfance, encore occupé par toutes sortes d’artisans, sans doute plus de maréchaux-ferrants, mais tant d’autres métiers indispensables au cœur d’une grande ville. Savoir qu’ils se pratiquent encore dans les entrailles du Louvre, à la différence de la plupart des musées du monde qui ont éloigné leurs ouvriers, cela me paraît rassurant. Et si vous ne pouvez pas, comme moi, visiter les caves, vous vous consolerez en allant admirer, trois étages plus haut, exactement à pic, la lumineuse Forge de Louis Le Nain (Sully, salle 912).