

Les MNR
Mon Louvre par Antoine Compagnon

Les MNR
Dans la galerie d’étude attenante aux sculptures de l’Europe du Nord, sorte de cul-de sac éloigné des sentiers battus, trois vitrines abritent un bric-à-brac d’œuvres d’époques et de tailles diverses (Denon, salle 167). On y trouve un Saint Georges du XIXe siècle auprès d’un Saint Jean du XVe, une Femme à la rose du XVIIIe siècle découvrant un sein voisinant avec une Vierge à l’Enfant du XVIe. Ce sont des MNR, comme on dit, des « Musées nationaux récupération », ou RFR « République française récupération » pour les sculptures, œuvres rapatriées d’Allemagne à la fin de la Seconde Guerre mondiale et toujours en attente de leur restitution à leurs légitimes propriétaires. Je n’avais pas remarqué qu’il existât dans les autres départements, de pareilles resserres pour les œuvres MNR accueillies au Louvre. Toutes sont répertoriées dans la base de données Rose-Valland des biens culturels spoliés, du nom de la conservatrice qui espionna l’entrepôt allemand au musée du Jeu de Paume. Ainsi averti, l’autre jour, au musée Calvet d’Avignon, il ne m’a pas échappé que les superbes Quatre Saisons d’Hubert Robert étaient des MNR déposées par le Louvre depuis 1953 et qu’elles complétaient avantageusement la collection du musée proprement dite. (Par la suite, au cours d’une visite aux peintures flamandes du Louvre, je suis tombé sur deux petites salles rassemblant des tableaux MNR n’ayant pas trouvé place avec leurs siècles et leurs écoles [Richelieu, salles 804-805].)