

Le pont des Arts
Mon Louvre par Antoine Compagnon

Le pont des Arts
On dirait une sorte de daguerréotype ou de proto-photographie, parce que, dans un musée, il est bon de regarder quelquefois par les fenêtres. Pour reposer son regard, mais aussi pour voir le monde autrement. Pas de meilleure vue sur Saint-Germain-l’Auxerrois que depuis les salles égyptiennes du premier étage donnant sur la colonnade du Louvre, ou du temple de l’Oratoire que de la chambre de Marie Leszczynska. Ce jour-là, je me trouvais du côté du musée de Charles X au milieu de l’après-midi, dans la Galerie Campana, parmi les vases grecs. Pour me changer les idées, je jetai un œil au-dehors. Les stores tamisaient la lumière, effaçaient les maigres couleurs d’hiver. La Seine, le pont des Arts, la coupole de l’Institut tenaient dans le cadre. Sans la tour Montparnasse et la voiture sur les quais, on se serait crus il y a deux siècles, du temps où le Salon annuel de peinture se tenait là.