Le four de Bernard Palissy

Mon Louvre par Antoine Compagnon

Le four de Bernard Palissy

Jardin des Tuileries

Le Louvre renferme bien des recoins étranges, mais celui-ci réalise un sommet de la cocasserie, inconnu du public et même des initiés. J’ai eu la chance d’y pénétrer. Au milieu des années 1980, au début des travaux du Grand Louvre et de la mise en souterrain de l’avenue du Général-Lemonnier, qui traverse le jardin des Tuileries et relie le pont Royal et la rue de Rivoli, les archéologues tombèrent, non loin de l’ancien château des Tuileries, près du pavillon de Flore, sur plusieurs fours, dont celui de Bernard Palissy, protégé de Catherine de Médicis, ainsi que sur quantité de moules de plâtre (coquillages, lézards, grenouilles) qui lui servaient à décorer ses céramiques. On ne sut que faire de l’encombrant four de Palissy, qui fut démonté et remonté dans les souterrains de béton aménagés sous les jardins du Carrousel et destinés à la logistique du palais. Il s’y trouve toujours, occupant toute la largeur et une bonne partie de la profondeur d’un local servant à entreposer le mobilier inusité du musée : tables et fauteuils de bureau, casiers métalliques de rangement et canapés Empire prenant la poussière. Qui connaît le four de Palissy ? Qui sait même qu’il existe ? Nous sommes ressortis à l’air libre par un étroit passage qui longe le pavillon de Flore, médusés par cette découverte.