Une grande famille

Une grande famille

À l’école primaire, Henri IV était mon roi préféré. Je n’étais pas le seul et cela n’a rien d’original. Dans notre livre d’histoire, il s’en sortait mieux que les autres, avec l’édit de Nantes et la poule au pot. Nous maudissions Ravaillac. Quand on m’emmenait au Louvre, nous devions rester un long moment devant les Rubens de la Galerie Médicis (Richelieu, salle 801). J’aimais en particulier Henri IV recevant le portrait de Marie de Médicis et tombant amoureux, car je n’avais pas imaginé que ça se passait comme ça. L’autre jour, tout cela m’est revenu à l’esprit quand je suis tombé sur ce plat représentant Henri IV et sa famille, la reine à sa droite, une gouvernante qui lui présente le jeune Louis XIII, ses compagnons derrière lui, et à sa gauche Vendôme, le fils légitimé de Gabrielle d’Estrées, sa maîtresse : una grande famiglia (Richelieu, salle 521, OA 1351). Cette céramique de l’école de Bernard Palissy paraît fort réaliste et sympathique. Elle reproduit fidèlement une estampe dessinée par Jean Le Clerc et gravée par Léonard Gaultier en 1602 : « Dieu veuille que de tout à son père il ressemble / Afin qu’il soit l’Hercule et le Mars des Français. » Mais, j’y pense, la scène pourrait bien se passer ici même, au palais du Louvre, non loin d’où nous sommes, dans les appartements du roi. Et ce plat est encore un don du collectionneur Sauvageot, le cousin Pons de Balzac, le bienfaiteur du département des Objets d’art.