Atelier

Mon Louvre par Antoine Compagnon

Atelier

La collection Moreau-Nélaton et les salles voisines, au deuxième étage de l’aile Sully, est envahie par toute une classe de dessin (salles 948-952). Ils se sont installés comme s’ils étaient chez eux, en terrain conquis. Accroupis au sol, par petits groupes de deux ou trois, ou solitaires, ils copient. Leurs vêtements et leur matériel sont étalés par terre et encombrent les banquettes. Impossible de s’asseoir. Je suis debout contre le mur, ils ne me voient pas. Devant les paysages de Corot, ou la Jeune orpheline au cimetière de Delacroix, ils se montrent leurs dessins les uns aux autres et les commentent. Ils sont bons, viennent sûrement d’une école d’art. Leur professeur, une jeune femme, passe parmi eux et suggère, corrige, apprécie. Soudain, à l’heure dite, tout est rangé en un instant, ils disparaissent comme une volée de moineaux ou de moinillons s’égaye sur un tableau de Carpaccio. Un seul retardataire s’est oublié dans un coin de salle, absorbé par sa copie. Il me plaît que le musée reste un atelier comme le voulaient ses créateurs.