Le christianisme constitue un trait d’union entre la Rome impériale et le monde médiéval car les architectures de l’esprit, et notamment les deux langues canoniques de l’Antiquité,
le latin et le grec, sont toujours utilisées et comprises. Par-delà les différences entre culture antique et culture médiévale, un fond commun appuyé sur une culture partagée reste efficace. À Byzance c’est tout naturellement et sans véritable rupture que l’évolution se produit, portée par la continuité culturelle et politique. À Rome et dans les anciennes provinces européennes, la transition est plus heurtée parce que la nature et le style du pouvoir ont changé, parce que des populations nouvelles, déjà présentes dans l’Empire ou à ses frontières, se sont imposées et affirmées. La récession de la langue latine suit les contours de l’effondrement de l’Empire mais le magistère des Anciens et le modèle politique et militaire de l’Empire n’ont pas disparu si vite. En parcourant les étapes de la sensibilité au passé et en explorant
le goût des ruines, tant dans le monde chrétien qu’en terre d’Islam, on tentera de définir l’attitude du monde médiéval face aux traditions souvent contradictoires qui s’attachent aux traces et aux vestiges du passé antique.
Alain Schnapp est professeur d’archéologie à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne et chercheur à la Maison de l’archéologie et de l’ethnologie. Il est ancien directeur de l’UFR d’histoire de l’art et d’archéologie de l’université Paris I et ancien directeur général de l’Institut national d’histoire de l’art (INHA). Il a été professeur invité à Princeton, Naples, Pérouse, Cambridge, Santa Monica et Heidelberg. Il est membre correspondant de l’Institut archéologique allemand et a reçu le prix de l’Association des études grecques. Ses activités de recherche ont porté sur trois domaines distincts : l’anthropologie de l’image en Grèce ancienne, l’histoire de l’archéologie et l’étude urbaine des cités et territoires du monde grec.