Parure martiale ou message royal ? L'armure avec l'histoire de Pompée, dite "Armure d'Henri II"

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Avec Philippe Malgouyres, conservateur en chef du département des Objets d'art

Au Louvre, dans le département des objets d'art, est exposée une armure, chef-d'œuvre de la parure martiale. Ornée de la bataille de Pompée, elle fut autrefois attribuée à Henri II. Philippe Malgouyres, conservateur en chef du département, en souligne l'importance historique et artistique.

Jean de Loisy, critique d'art et commissaire d'exposition reçoit Philippe Malgouyres, conservateur en chef du département des objets d'art du musée du Louvre, pour parler du mystère que recèle cette armure admirable, chef-d'œuvre en France de ces parures triomphales qui furent si prisées au XVIᵉ siècle. À qui était-elle destinée ? Puisque l'appellation "Armure de Henri II" est aujourd'hui contestée, qui l'a réalisée ?

L'énigme est probablement aussi celle de son iconographie. En effet, lion, héros, demi-dieu ou figure d'effroi comme la méduse sont souvent les décors naturels qui marquent la puissance de celui qui la revêt. Mais se parer de la représentation d'une défaite peut sembler paradoxal, à moins que cet extraordinaire objet ne soit pas tant une armure qu'un message.

Une parure martiale exceptionnelle

L'armure avec l'histoire de Pompée, autrefois dite "d'Henri II" est de grande taille, près d'un mètre 85 de haut, et a été réalisée vers 1560. Elle est merveilleusement ornée en toutes ses parties de scènes réalistes représentant avec grande virtuosité et un sens de l'espace raffiné, les épisodes tragiques de la rivalité entre César et Pompée et de son sommet, que fut la fameuse bataille de Pharsal, telle qu'elle fut décrite par un auteur latin du 1ᵉʳ siècle, Lucain.

Une armure qui vanterait à la fois l'héritage de la chevalerie et les sources de la monarchie

Comme l’exprime Philippe Malgouyres, l'armure exalte un héritage chevaleresque afin d’offrir une assise solide à la monarchie. Le courage, l’intrépidité et le stoïcisme, autant de valeurs chevaleresques, sont en effet des vertus que la monarchie de Louis XIV revendiqua. "Dans cette armure, explique Philippe Malgouyres, il y a deux aspects qui sont intéressants et qui sont liés à cette question de l'imaginaire chevaleresque des souverains du XVIᵉ siècle. La chevalerie était évidemment disparue à ce moment, mais persistait dans l'idéal courtois, de la vertu, du courage. Le souverain devait non seulement être le prince, mais aussi être le chevalier par excellence. Et cela est visible par le fait que cette armure soit blanche, dans ce métal nu qui rappelle les armures du Moyen Âge (...) Et l'autre chose, c'est cet élément légèrement archaïque dans les deux pièces d'épaule, qui ont ces deux lames, rivées, lui donnant cette silhouette très particulière, et qu'on trouve sur des armures du début du XVIᵉ siècle. Comme l'on voit d'ailleurs dans la célèbre gravure de Dürer, cette idée du chevalier chrétien est une chose extrêmement importante pendant tout le XVIᵉ siècle".


Podcast "Chefs-d'œuvre en vies", par Jean de Loisy
Coproduction France Culture - Musée du Louvre
Avec les voix de Clotilde Hesme et et Micha Lescot
Réalisation : Céline Ters

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