Figures du Fou
16 octobre 2024 – 3 février 2025
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La Nef des fousHieronymus Bosch
Satire des noceurs débauchés, dit La Nef des fous
vers 1505-1515
Huile sur chêne, 58 x 33 cm
Paris, musée du Louvre, département des Peintures, RF 2218
Lors de la redécouverte de ce panneau en 1914, le titre de La Nef des fous lui est attribué. L’iconographie semble, en effet, directement le rattacher au thème de l’ouvrage publié en 1494 par l’érudit strasbourgeois Sébastien Brant. Les bouleversements intellectuels, religieux et sociaux de l’époque trouveraient leur origine dans la folie se répandant telle une épidémie. Ce phénomène s’apparenterait à la dérive d’un bateau à bord duquel auraient pris place des fous, divaguant sans gouvernail ni boussole sur la mer du monde, et se dirigeant vers l’abime. Dressant une sorte de cartographie de la folie, Brant l’identifie à l’hubris, la démesure, qui prend la forme d’un renoncement à Dieu. La conclusion logique en étant qu’elle est l’œuvre du diable.
Dans le contexte de la naissance de l’imprimerie, le texte de Brant rencontre un grand succès, plusieurs fois réédité et traduit. Illustré dès la première édition, sa large diffusion contribue à fixer l’identité visuelle du fou, doté d’un costume bien défini : un vêtement bariolé, une coiffure agrémentée d’oreilles d’âne et de grelots, une marotte – parodie de sceptre, à son image. De même, la représentation des fous voguant à bord d’un navire est extrêmement populaire. Ainsi, la proximité chronologique et iconographique du panneau de Bosch a conduit à l’identifier comme une « nef des fous ».
Il faut néanmoins replacer le fragment dans son ensemble. Il s’agit en effet d’un élément de triptyque. Le panneau central est perdu ou n’a pas encore été identifié. Les volets ont été dédoublés dans l’épaisseur. Les faces extérieures ont été réunies et découpées selon un dessin octogonal autour du médaillon central. La face intérieure du volet de droite a été conservée en l’état, celle du volet de gauche découpée en deux parties inégales, le tableau du Louvre en constituant la partie supérieure. Les deux volets fermés montrent un homme âgé, cheminant appuyé sur un bâton, probable métaphore de l’homme. Sur le volet de droite, un avare sur son lit de mort hésite à renoncer à ses richesses. Sur la partie inférieure de celui de droite, un couple s’apprête à succomber à la luxure, tandis que sur la partie supérieure, des noceurs festoient.
Le thème général est ainsi celui des péchés capitaux, comme sur un autre triptyque de Bosch, Le Char à foin, conservé au Prado. On notera cependant qu’un fou avec sa marotte est bien présent sur le panneau du Louvre, qui atteste de l’omniprésence de cette figure dans les représentations contemporaines.
Une nouvelle interprétation iconographique
Satire des noceurs débauchés, dit La Nef des fous, Hieronymus Bosch
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